Cyril Jaquiard : un jeune Grangeois passionné d’histoire et d’archéologie

Texte de Jane et Grégoire Demaurex

Cyril grandit à Granges. Enfant du cru, il baigne dans un environnement familial d’enseignants. Une fois au Collège du Sud à Bulle, il choisit l’histoire en option complémentaire. Une vraie passion, l’histoire !

Avec un ami féru des temps passés, Nathanaël Mornod, ils sont approchés par leur professeur Serge Rossier pour documenter l’histoire de Montbarry. La réhabilitation de cet établissement, icône du patrimoine touristique gruyérien du début du 20ème siècle, est à l’agenda. Le préfet de la Gruyère finit de convaincre Serge Rossier de la nécessité d’une mise en contexte historique. Les deux jeunes passionnés s’engagent alors sans compter dans ce projet. Cyril et Nathanaël se mettent en quête d’une documentation de la vocation d’accueil du lieu. Centre de bien-être avant la lettre grâce à sa source d’eau, Montbarry attire des visiteurs de Suisse romande, d’outre-Sarine, voire de l’étranger.

Cyril jacquiard photo jane demaurex
Cyril jacquiard photo jane demaurex

Le récit de Montbarry ou comment « être complet mais pas obscur »

Au tout début du 20ème siècle, le tourisme suisse a le vent en poupe. Victor Tissot, Fribourgeois installé dans la bonne société parisienne, rénove, investit et fait connaître le lieu. Un couple d’hôteliers, les Beetschen reprennent l’établissement, mais la première guerre mondiale a finalement raison de leur affaire. S’en suit l’intermède de l’entre-deux guerres. À la fin de la deuxième guerre mondiale, une communauté de sœurs cisterciennes s’installe à Montbarry. Venue de France, elle donne au lieu sa vocation de retraite. Cette période est la moins bien documentée. Les sœurs n’ont quasiment laissé aucun écrit. Des documents ont même disparu. Ils rencontrent la mère supérieure, survivante de l’ordre avec deux autres nonagénaires. Malgré les efforts de documentation des deux jeunes, le projet de transformation de Montbarry ne se réalise pas. L’idée d’en faire un lieu de vie pour personnes en situation de handicap se heurte aux contraintes financières et aux restrictions d’extension du bâtiment…

Le travail des deux compères leur a toutefois ouvert des portes. Une connaissance de Nathanaël, historien et animateur d’une émission à Radio Fribourg, les invite à partager l’histoire de Montbarry. L’historien est convaincu de l’intérêt du récit. Il les met en contact avec l’éditeur Cabédita. Il s’agit désormais de rendre l’histoire accessible à un plus large public. L’idée est aussi de remplir les vides, d’assurer un meilleur équilibre, une meilleure complétude du récit. Ils retravaillent alors le texte de manière à le publier

Cyril revient au présent. Aussi loin qu’il s’en souvienne, cette passion d’aller gratter l’histoire a toujours été en lui. Pour lui, un historien doit rendre accessible au plus grand nombre, il doit savoir vulgariser son travail d’investigation. « Être complet sans être obscur » tel est l’optique de Cyril.

L’expérience de Montbarry fut déterminante pour lui. L’histoire, « c’est d’abord le fruit des visions des personnages qui la font et parfois de leurs contradictions ». D’un côté, des gens flamboyants comme Victor Tissot. De l’autre côté, des personnages plus austères et consensuels comme la famille d’hôteliers des Beetschen. « À Montbarry, ce sont les personnages qui ont donné la couleur au lieu » souligne le jeune Grangeois.

Un petit air d’Indiana Jones

Cyril
Cyril

Après cette belle expérience initiatique d’historien en devenir, Cyril s’est orienté vers l’archéologie. En troisième année à l’université de Genève, il continue à vivre sa passion. Avec un petit air d’Harrison Ford (à ses débuts dans Indiana Jones), il part sur les traces de vestiges antiques et cherche à comprendre la vie de populations disparues. Cyril est convaincu de son choix.  Il effectue deux stages d’un mois en Afrique. L’université y poursuit depuis plusieurs années des recherches. Les petites volées d’élèves et la disponibilité des professeurs permettent aux étudiants de mettre rapidement la main à la pâte. Dans le sillage de chercheurs prestigieux et de figures tutélaires, Cyril observe ce milieu tout en gardant une certaine distance. Lors de son stage sur les vestiges de la ville de Kerma dans l’ancienne Nubie (Soudan actuel), il découvre une société millénaire dans l’ombre de sa voisine égyptienne.

Le manque de documents écrits sur les cultures africaines oblige l’étudiant en archéologie à un travail multidisciplinaire. L’Afrique est d’un accès moins direct que les civilisations mieux documentées que sont l’Egypte ou la Grèce antique. Dans la culture africaine, des conteurs vont de villages en villages et enrichissent les épopées de détails à chacune de leurs étapes. L’archéologue se doit de tenir compte de cet héritage parlé. Cyril insiste sur le besoin de valoriser cette tradition orale. Cette approche fondée sur le vécu des habitants des lieux met l’accent sur les gens. L’histoire d’un village, c’est aussi celle des générations qui s’y succèdent  et de leurs mémoires. Cyril évoque les souvenirs de sa grand-maman, « une Berset de Granges», qui lui parle parfois des temps d’avant et des moments difficiles finalement pas si lointains.